La complexité et les caractéristiques d’une plaie influencent sa guérison et déterminent le succès de sa cicatrisation. L’âge avancé, les maladies cardiovasculaires/pulmonaires, l’obésité ou un état nutritionnel insuffisant, une insuffisance rénale, le diabète, une colonisation/infection locale, une plaie de grande dimension, la présence de sécrétions et des niveaux élevés d’exsudat, voici certains des principaux facteurs de risque dans la gestion des plaies chroniques. Sans le moindre doute, le traitement systémique est fondamental.
Cependant, une préparation adéquate du lit de la plaie – à l’aide de pansement élaborés ou encore d’un traitement chirurgical – est nécessaire afin de stimuler l’initiation de la cicatrisation.
Étude de cas
Cette étude a été menée en 2014 sur le cas paradigmatique d’un homme de 57 ans avec un ulcère de jambe chronique complexe. Le patient présentait un syndrome métabolique, une obésité, du diabète et une maladie cardiaque. Des ulcères veineux circonférentiels et extrêmement douloureux étaient présents depuis deux ans et localement colonisés par des espèces du genre Enterobacter depuis plus d’un an. L’ulcère avait déjà été traité par un médecin généraliste avec un pansement hydrofibre à l’argent. Il mesurait 12 cm x 25 cm. Le patient était sous traitement médical pour les comorbidités mentionnées ci-dessus et, mis à part les problèmes de cicatrisation, son état général était stable.
Le traitement a été effectué dans le service de chirurgie plastique de l’Hôpital universitaire de Padoue, en Italie. Un tel traitement requiert des étapes précises, telles que le débridement chirurgical, la TPN avec instillation et temps de contact (V.A.C. VERAFLO Therapy ; 3M + KCI), une solution pour tampon microbiologique et, une fois que la formation de tissu de granulation est satisfaisante, une tentative de fermeture définitive par application d’une greffe de peau (comme dans le cas présent). En général, lorsqu’il s’agit de plaies chroniques et infectées, les auteurs préfèrent utiliser la TPN avec instillation et temps de contact plutôt que la TPN traditionnelle.
Un débridement chirurgical et l’application locale d’une TPN avec instillation et temps de contact (-100 mm Hg, 32 mL de volume instillé, temps de contact 10 minutes, durée totale du cycle : 2 heures) ont été effectués ; initialement, 0,05 % d’hypochlorite de sodium ont été instillés en raison de la présence d’espèces du genre Enterobacter. Après trois jours de TPN avec instillation, lors du premier changement de pansement , les tampons microbiologiques étaient négatifs et la solution a été remplacée par une solution saline. Le patient étant diabétique et la plaie étant colonisée, par précaution, de la céfazoline a été administrée postopératoire par intraveineuse pendant une semaine. Après 16 jours de TPN avec instillation, une greffe de peau a été effectuée et la plaie a été traitée par TPN traditionnelle avec une mousse d’alcool de polyvinyle (-75 mm Hg, pression continue) pendant une semaine . Les conditions de la plaie se sont améliorées après une semaine de TPN. La guérison complète a été atteinte après 25 jours et la plaie était encore fermée et stable au contrôle des 3 mois. Aucun effet adverse n’a été observé.
Discussion
Les études précliniques et les résultats cliniques soutiennent le fait que la TPN avec instillation et temps de contact est efficace dans le traitement des ulcères chroniques infectés et complexes ; non seulement elle élimine les exsudats, mais elle nettoie la plaie des sécrétions et des débris et réduit (mais n’élimine pas totalement) la charge bactérienne. Elle favorise la formation de tissu de granulation. Les statistiques indiquent un tissu de granulation significativement plus épais que dans les plaies traitées par TPN traditionnelle, mais des études ultérieures sont nécessaires pour vérifier ces résultats.
La TPN avec instillation et temps de contact agit comme détersion continue et renforce l’étape chirurgicale, réduisant la nécessité d’autres procédures opératoires qui doivent être évitées chez les patients présentant des risques liés à l’anesthésie. Il est préférable de réserver ce traitement aux plaies complexes chez les patients atteints de multiples comorbidités, d’une grave infection (ulcère diabétique) ou d’une plaie post-traumatique compliquée (ostéomyélite).
En 2014, les auteurs ne disposaient d’aucune directive documentée sur l’utilisation appropriée et le calibrage de la TPN avec instillation. De telles directives existent aujourd’hui, bien qu’aucune ne se focalise sur un type spécifique de plaie ni n’indique quelle solution est la plus appropriée pour l’instillation.
Ce traitement ne peut être administré que dans une structure hospitalière, cependant les auteurs estiment que la TPN avec instillation devrait être recommandée pour le traitement des plaies complexes de par sa capacité à réduire la charge bactérienne, à minimiser la durée de la permanence en hôpital, à réduire le nombre de débridement chirurgicaux et à faciliter
et accélérer la fermeture de la plaie.
Conclusions
L’expérience démontre que le calibrage de la TPN par instillation doit être adapté en fonction de la douleur et des conditions locales qui sont à même de changer au fil du temps.
Le choix de la solution devrait être effectué en fonction du tampon microbiologique. Afin de lutter contre la résistance bactérienne, l’application locale d’antibiotiques n’est pas recommandée.
Chez les patients présentant une plaie complexe, il est préférable de commencer par une TPN avec instillation avant la TPN traditionnelle pour la reconstruction finale par greffe de peau ou par lambeau. Ce rapport est limité au seul cas étudié de plaie chronique d’origine veineuse. D’autres études sont nécessaires pour clarifier l’association appropriée entre le type de plaie et le type de solution et pour vérifier si ce dispositif peut être utilisé dans tous les types d’ulcères (diabétiques, de pression, etc.).